L’investissement dans le foncier rural connaît actuellement un regain d’intérêt ; le prix des terres croît. Le loyer des terres rapporte peu mais est assez sûr quant à son placements. Les règles du droit privé et du droit public s’imbriquent dans le Code rurale et de la pêche maritime (C. rur.) pour encadrer, de façon heureuse ou pas, ce secteur économique. Nous nous proposons de passer en revue ses principales composantes.

La SAFER : un régulateur du marché foncier rural

Les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) sont des personnes morales de droit privé investies d’une mission de service public. Pour l’essentiel, « elles ont pour mission d’améliorer les structures foncières par l’installation ou le maintien d’exploitants agricole ou forestiers, par l’accroissement de la superficie de certaines exploitations agricoles ou forestières, par la mise en valeur des sols et, éventuellement par l’aménagement et le  remaniement parcellaires » (art L 141-1, al 2 C. rur), mais aussi le réaménagement rural, l’environnement … Pour réaliser ces missions, chaque SAFER peut, à l’intérieur de sa zone géographique de compétence, acquérir amiablement des biens ruraux et, conformément à un décret d’habilitation, exercer un droit de préemption lors de l’aliénation à titre onéreux d’un immeuble rural (le projet de loi d’avenir agricole en discussion au Parlement renforce ce rôle). A cet effet, les projets d’aliénation à titre onéreux de tels biens doivent lui être notifiés préalablement. Si la SAFER considère que le prix est exagéré, elle peut faire une offre à ses propres conditions – libre alors au vendeur de retirer le bien de la vente ou de demander une révision du prix devant le tribunal (art L 143-10, C. rur.). Le but ultime d’une acquisition par la SAFER est la réattribution des biens à des exploitants.

Les GFA : une société foncière spécifique

La création d’un groupement foncier agricole (GFA) est un moyen spécifique régi par le Code rural (art L 322-1 et suiv.) de dissociation de l’approbation des terres de leur exploitation en ce ses que les propriétaires foncier se groupent et donnent normalement les terres apportées à bail à long terme ou à bail cessible pour bénéficier des avantages fiscaux attachés à la transmission des parts sociales à titre gratuit (exonération partielle en vertu des articles 793, 1, 4°, et 793 bis du CGI) et d’une exonération d’ISF au titre des biens professionnels (art 885 H, 885 P et 885 Q du CGI). Les GFA sont souvent constitués entre proches parents pour pleinement bénéficier des exonérations fiscales : un GFA constitué par des membres d’une même famille donne les terres à bail à un descendant agriculteur ou à une société agricoles d’exploitation (tel un GEAC, groupement agricole d’exploitation en commun) constituée entre les membres du groupe familial. Il y a toutefois d’autres formules, comme les GFA dits investisseurs, constitués à l’initiative d’acteurs du monde rural (notaire, banque, …) qui incitent des personnes étrangères à l’agriculture à y investir des capitaux en vue de l’acquisition de terres qui seront par la suite louées. Les lourdeurs du fonctionnement des GFA peuvent conduire à se tourner vers d’autres types de sociétés de droit commun (sociétés civiles…).

Les baux ruraux : exploiter en faire-valoir indirect

L’exploitation en location (faire-valoir indirect) limite la charge des investissements initiaux. La formule dominante est le bail à ferme : sa durée est de 9 ans, il se renouvelle, de fermier jouit d’un droit de préemption en cas vente des biens louées, le loyer nommé « fermage » est fixé par les parties à l’intérieur d’une fourchette (maxi/mini) établie par le préfet du département, son non-paiement peut être sanctionné, par la résiliation du bail (art L 411-31, C. rur.), le fermier a droit en sortie à indemnisation par le bailleur de ses travaux d’amélioration… Mais il ne peut prétendre céder son bail, sauf exceptions dans le cadre familial, et en tout cas sans rétribution, à ce titre.

La législateur a apporté quelques assouplissements au statut du fermage avec les baux ruraux à long terme et les baux ruraux cessibles. En contrepartie d’une plus longue (18 ans et plus), le bailleur peut notamment percevoir un fermage majoré (ce qui est appréciable vu sa modicité ordinaire) et bénéficier d’avantages fiscaux au titre des droits de mutation à titre gratuit des biens loués et de l’ISF. Concernant spécifiquement les baux cessibles (de même durée) ils peuvent par définition être cédés, dans le cadre familial ou non, avec ou sans pas de porte et participer ainsi du fonds agricole (dont la création est optionnelle et ne conditionne pas l’application du statut du fermage).

Le contrôle des structures : la mise en valeur des terres

Le relative pénurie de terres agricoles, il y a quelques années, a conduit le législateur à mettre sur pied un système de contrôle des structures. Il s’applique non à la propriété mais à la mise en valeur des terres agricoles ou des ateliers de production hors sol au sein d’une exploitation agricole. L’objectif prioritaire du contrôle des structures est de favoriser l’installation d’agriculteurs. Cette finalité est poursuivie indirectement en luttant contre le démembrement d’exploitations agricoles viables qui ont une surface insuffisante (art L 331-1, C. rur). Les priorités de la politiques d’aménagement des structures agricoles et les conditions d’application du contrôle des structures mises en oeuvre dans chaque département par le schéma directeur départemental (art. L 331-3, C.rur). Les opérations d’installation, d’agrandissement ou de réunion d’exploitations peuvent ainsi nécessiter une autorisation administrative préalable. Des sanctions économiques lourdes garantissent le respect de la procédure.